Œdipe

En s’emparant du texte de Sénèque, Œdipe, le metteur en scène François Orsoni poursuit son exploration des liens entre théâtre et politique et propose une nouvelle création autour du théâtre romain, un théâtre performatif, transversal et ludique. C’est aussi un théâtre hautement politique, Sénèque, le conseiller de l’empereur, exprime ici l’obscurantisme et la lumière qui rythment la vie politique de nos nations.
Œdipe a en genèse une dimension transnationale et totalement universelle : c’est un récit qui a déjà traversé les frontières. De la Grèce antique aux amphithéâtres romains – et sa réécriture par Sénèque – à sa migration au fil des siècles vers les cabinets psychanalytiques viennois, en passant par l’Italie de Pier Paolo Pasolini, cette histoire a déjà fait un grand voyage. Elle décrit les ravages du pouvoir et de la guerre, les conséquences désastreuses des décisions politiques et leurs conséquences sur les populations.
Œdipe sera une pièce théâtrale et musicale. Entouré d’interprètes et de musicien.nes de différentes nationalités, François Orsoni souhaite poursuivre ce voyage, ne pas limiter l’écho de ce mythe à une spécificité nationale, mais au contraire, à l’heure des nationalismes qui s’imposent, replacer cette histoire dans un contexte européen.

Les mort.e.s se logent partout (titre provisoire)

Que fait-on symboliquement de nos mort.es ?
Quelles relations continue-t-on d’entretenir avec ces invisibles ?
Pourquoi tenons-nous les mort.es à l’écart de la société ? Depuis quand ?
Et d’où vient cette injonction au deuil ? Est-il possible que certain.es mort.es, par-delà leur disparition, continuent d’interagir avec nous ?

Ce sont ces questions qui vont me permettre d’entrer dans mon sujet. Et c’est à l’aide du travail de recherche de Magali Molinié, ainsi que de la théorie qu’elle a élaborée, que nous pourrons à deux construire une théâtralité. En cohérence avec les formes que j’ai l’habitude de développer, je tenterai ainsi d’établir un voyage permanent entre l’intime et la science, entre le réel et la fable, entre mon histoire personnelle et celle de tout.es.

Ce projet sera une sorte « d’éthologie de l’interdépendance », pour reprendre les mots de Vinciane Despret. Il s’agira de faire entendre une autre version de la mort que celle que nous impose la société occidentale. Les mort.es se logent partout, même si on essaie toujours de les refouler au cimetière. C’est de ces mort·es qui restent, qui continuent de partager des choses avec nous, ces mort.es qui « ne passent pas », selon les mots de Magali Molinié, dont nous voulons parler ici.

Les Evaporé·e·s

Qui n’a pas eu envie un jour de tout plaquer et recommencer à zéro ? D’aller chercher des cigarettes et ne jamais revenir ? C’est ce qui arrive ce matin-là à Joris Lafont, fleuriste dans une petite ville du Morbihan. L’homme mène une vie ordinaire au milieu de gens ordinaires dans une ville ordinaire ou du moins le pense-t-il. Un matin, il décide de partir, quitter famille, boulot, voisins et tout le reste. Partir sans but ni destination. Ou du moins le pense-t-il. Fuite ou délivrance ? Ou juste enfin le désir de goûter à ce qu’on appelle communément, la liberté.
Nous suivrons Joris dans son voyage, sa quête à travers ses doutes, ses peurs mais aussi et surtout son irrépressible soif de renaissance. Où son périple le mènera-t-il ? Nul ne le sait encore, des pistes s’esquissent de Tokyo au fin fond de l’Amazonie, de gares en aéroports, le trajet ou la quête selon, reste encore à définir mais l’issue sera inattendue. Forcément.

ALINE

Aline est un projet de fiction théâtrale qui a pour thème la vérité.
Et le rapport tumultueux qu’elle entretient avec la parole.

ALINE est un projet de spectacle en cours d’écriture qui réunit Jean Le Peltier et Lucas Meister.
Il explore le rapport tumultueux que le langage peut entretenir avec la vérité.
Deux amis de longue date, Rodolphe et Luis, se parlent peu mais marchent de
coutume chaque été en silence dans la nature. En silence parce qu’ils ne savent pas trop quoi se dire. Rodolphe prépare tout à l’avance et Luis suit le mouvement. Mais cet été Luis décide d’improviser, il prétend connaître une amie, Aline, dont on peut rejoindre la maison par un chemin qu’il connait bien. Il ment. Ce petit mensonge sera le début d’un grand ajustement entre les deux amis sur leur compréhension relative de la vérité. Et l’occasion de rencontrer Sam, une jeune femme qui vit reculée du monde, du travail, des promesses et du langage en général.
La prétendue maison d’Aline, où vit Sam, devient un espace verbal fluctuant, quand les mots raisonnent d’une étrange manière et que leur substance logique se décompose.
Un infra-monde apparait où sommeillent d’étranges animaux blancs contre lesquels on peut aller se blottir au grenier avec un petit frisson d’appréhension.

Phantasia

« PHANTASIA c’est un seul en scène.
PHANTASIA c’est une fable.
PHANTASIA c’est une expérience visuelle.
PHANTASIA parle du fait que, d’accord, on est des gros malin·es,
mais que, quand même, parfois on est aussi prêt à croire n’importe quoi.
Par exemple, si on nous demande maintenant, pourquoi lorsqu’il y a du soleil, notre peau ressent de la chaleur, nous, on va penser : le soleil est chaud – très chaud même, comme c’est une immense boule de feu – si bien que c’est normal qu’il nous chauffe, tout comme le feu nous chauffe quand on approche notre main.
Jamais, on irait penser, à première vue, que la chaleur du feu du Soleil ne pourrait jamais parcourir les cent quarante neuf millions cinq cent nonante sept mille huit cent septante kilomètres sept cents qui nous sépare de lui, parce que l’espace est vide et que donc la chaleur du soleil reste prisonnière du Soleil, n’ayant aucun moyen de se diffuser.
Jamais on irait penser que la chaleur provient de la lumière, de ses photons, parce que seule la lumière se propage dans l’Espace grâce ces particules élémentaires qui se déplacent dans le vide interstellaire à la vitesse de la lumière, soit 300 000 km/seconde environ.
Jamais on irait penser qu’au contact de l’atmosphère, ces photons heurtent les particules de l’air terrestre en perdant de l’énergie. Et que cette énergie provoque de la chaleur comme des microscopiques balles de mitraillettes qui chaufferaient leur point d’impact. Et que seuls les photons qui voyagent avec des longueurs d’onde proches de l’infrarouge et qui sont absorbés
directement par notre peau, nous donnent une impression de chaleur. Et que ceux qui servent aux plantes pour la photosynthèse et ceux qui produisent de l’électricité grâce aux cellules photovoltaïques, voyagent dans des longueurs d’ondes encore différentes. (…) » Jean Le Peltier

Nos Empereurs

Sujet classé pour les uns, objectif politique pour les autres: où en est la décolonisation du continent africain?
Après la fresque écologique Le temps des fins, Guillaume Cayet signe une nouvelle création ambitieuse qui prend racine au Bénin, racontant la trajectoire d’un homme sur plus d’un siècle de 1895 à aujourd’hui.

À en croire les livres d’Histoire, le temps de l’Empire colonial est un chapitre clos depuis longtemps. Mais le XXIe siècle marque-t-il vraiment la fin des spoliations méthodiques orchestrées depuis des siècles? Le temps des colonies est-il vraiment fini?

Sous la forme d’une grande fresque, Nos Empereurs raconte l’histoire d’un homme, Armand Lamarque, et celle de sa famille française, de son arrivée en 1896 au Bénin jusqu’ à nos jours. En suivant l’itinéraire de cet homme, empereur-vampire colonial, capitaine de l’armée française devenu industriel et celui de sa famille, c’est à une autopsie de l’entreprise coloniale que nous invite ce spectacle. Missionnaires, militaires, mercenaires et expatrié·e·s se côtoient dans cette fable aux allures de conte fantastique. En creux, c’est l’histoire d’une terre spoliée, de peuples dominés, l’histoire de luttes et de soulèvements anti-coloniaux que ce spectacle raconte.
Nos Empereurs nous plonge au cœur de la présence blanche et française au Bénin. Une tentative théâtrale poétique et politique d’écrire une certaine histoire du colonialisme et du néo-colonialisme. Sur scène, dans une scénographie épurée, sur un plateau de terre, se transformant en plancher, puis en bac de boue, entouré de huit comédien·ne·s (jouant également en live la musique du spectacle), Guillaume Cayet oppose à la violence de l’Histoire et au fatalisme de la réalité, une écriture scénique, littéraire et musicale qui observe le monde pour y découvrir les possibilités de sa transformation.

Dame jument

Une femme nous raconte l’histoire de Laëtitia Duval, jument solitaire vivant dans un pré clôturé. Ancienne compétitrice de saut d’obstacle, la bête a déçu les attentes que les humains avaient en elle. Aujourd’hui inutile, elle erre dans un quotidien monotone, visitée le jour par sa propriétaire qui la traite en jouet, et la nuit par un poulain disparu avec qui elle gambade (en rêve) dans des prairies verdoyantes.
Dame Jument fait un pari interspéciste : celui qu’en parlant de la jument, la femme parle d’elle, et par ricochet, de nous. Quelle carotte achète notre résignation ? Quelle étrange honte s’attache à un corps qui n’a pas répondu aux exigences de performance ? Quelle révolution intérieure provoque la maternité ?
Alors que la femme peine à trouver des chemins d’émancipation à sa jument, un garçon entre sur scène. C’est son fils. Avec une irrévérence qui redonne du souffle à un monde clos sur lui-même, il rompt la mélancolie du soliloque maternel. C’est dans le dialogue que la femme trouvera finalement la forme qui lui convient, celle de la jument de ses rêves.

« Depuis que je suis mère, les animaux de la ferme ont fait leur entrée dans mon quotidien, dans une langue particulière, celle du conte pour enfant. Cet usage du vivant au profit de l’éducation de notre progéniture me questionne, me faire rire et me scandalise. Elle a quelque chose de grinçant à l’âge de l’anthropocène, alors que l’activité humaine est repérée comme la cause de la disparition de la biodiversité. Avec Dame jument, je souhaite écrire un contre-conte animalier, dont l’héroïne serait non pas le jeune enfant, ou le petit ours, mais une femelle, mise en retraite anticipée, mal sevrée de son poulain, isolée dans un pré. Témoignant de l’hybridité du vivant, entre naturel et artificiel, et de l’imbrication du règne animal avec le politique.
Je souhaite plonger dans les actions répétitives du vivant : brouter, avaler, déféquer, dormir, se défendre contre la mouche, actions essentielles et avilissantes, et par là- même sonder de nouvelles temporalités théâtrales.
Traverser ce récit va se révéler être une entreprise périlleuse pour la femme, sauvée in extremis par l’arrivée d’un deuxième personnage : son fils.
Dans ce conte interspéciste la forme vient au secours du fond : en pénétrant le soliloque de sa mère, le fils redonne du souffle à un monde clos. L’émancipation ne se fera pas dans la solitude, mais en dialogue. »

TWO

TWO est une pièce sur la relation à l’autre, les relations possibles à toute forme humaine que l’on rencontre.  À partir d’un dispositif simple, un espace limité de 2m par 2m, deux performereuses cherchent à entrer en contact puis se libérer de ce contact. Personne ne sait ce qui va se passer, ni le public ni les performereuses. TWO est une forme qui s’écrit à l’instant présent pour dévier des enjeux de représentations de certaines relations. Ainsi, Audrey et un-en interprète y explorent la découverte d’un corps étranger à iels-mêmes, l’accord & le désaccord des corps, la fusion, le repoussé, la domination, la violence, l’extrême tendresse. Iels s’y confrontent aux frontières des relations, sans apposer de rôles afin que toustes y apposent son interprétation : couple, amitié, sororité, maternité, parenté, rivalité, etc.

TWO se joue dedans, dehors, en 1H30, en 4H et certainement d’autres dispositifs à expérimenter ! Cette pièce peut être vue par bribes ou dans son entièreté. Elle est un travail à vue. Un moment non spectaculaire mais hypnotisant. C’est aussi une forme de rencontre d’Audrey avec un.e performereuse. Dans TWO, on se relationne sincèrement : c’est la réalité et la fiction qui se jouent en même temps.

QUEEN B – Devenir reine

POINT DE DEPART
Olivier Michel, programmateur de la Péniche Pop, et Elise Dabrowski, artiste associée, ont invité Pauline Tremblay à créer une performance autour de Run the worlds (Girls) de Béyoncé, dans le cadre du Festival (Re)Mix# 4 «Protest songs, musiques de résistance».
L’analyse du clip de Run the World (Girls) de Queen B. est devenue l’occasion pour la chorégraphe de revisiter sa propre trajectoire de féministe en tant que femme née dans les années 80 : de la devise « si tu sors comme ça il va t’arriver des bricoles », en passant par le Girl Power des Spices Girls, le punk, le féminisme universitaire, la réappropriation du male gaze, les tuto de danse sur YouTube, les premières manifs pour l’avortement, Metoo, les premiers cours de danse et les premiers lumbagos…
Le décryptage chorégraphique, iconographique et socio-économique du clip de Béyoncé de 4 minutes devient le support pour retraverser 4 décennies d’une quête d’émancipation plus ou moins réussie.
C’est une performance féministe Pop qui n’en est pas moins punk.

Woyzeck ou la vocation

Tünde Deak en dialogue avec Woyzeck de Georg Büchner

Qu’est-ce qui déclenche une vocation artistique? Tünde Deak remonte le fil jusqu’à une représentation fondatrice de Woyzeck qui l’a bouleversée à vingt ans. Entre enquête autobiographique et fragments de Büchner, elle explore ce moment où l’on commence à devenir soi.

En 2001, Tünde Deak assiste à la Maison de la Culture de Bobigny (MC93) à une représentation de Woyzeck, mise en scène par l’artiste hongrois Arpad Schilling. Elle a vingt ans. Ce jour-là, un corps gît sur scène – celui de Woyzeck, prolétaire humilié, broyé par les figures d’autorité, sombrant dans la folie jusqu’à tuer celle qu’il aime. À première vue, rien ne reliait la jeune femme qu’elle était à cette figure tragique née sous la plume de Georg Büchner en 1836. Et pourtant, ce spectacle en hongrois, dans la langue de ses origines, la bouleverse profondément. Il déclenche ce qu’elle nommera plus tard sa «vocation» de metteuse en scène. Aujourd’hui, Tünde Deak se replonge dans cette pièce fondatrice avec ses yeux d’adulte. Que s’est-il vraiment passé ce soir-là? Qu’est-ce qui l’a saisie au point de transformer son rapport au monde? Après avoir interrogé les tiraillements de la double-culture dans Tünde [tyndε] et dans Ladilom, et une nouvelle fois avec la complicité de la musicienne Léopoldine HH, Tünde Deak explore comment la découverte de ce spectacle a finalement été l’occasion de rencontrer un autre langage, celui du théâtre.